Histoire d’un vœu – Héloïse et la Ressourcerie
Laissez-moi vous conter l’histoire d’un voeu « Héloïse et la Ressourcerie ». Celle d’une adolescente, Héloïse, qui passe ses vacances chez ses grands-parents. Aucun réseau, pas d’amis, la campagne à perte de vue… En clair, l’Enfer sur Terre ! Du moins, c’est ce qu’elle croit. Mais il suffira d’une boîte à musique, d’un voeu et d’une Ressourcerie pour qu’elle y trouve son compte. Voire davantage…
Je vous laisse découvir.

Des vacances à la campagne
Héloïse s’ennuyait.
Son père étant en déplacement, il l’avait confiée à ses grands-parents pendant les vacances scolaires. Ce n’est pas qu’elle n’aimait pas ses grands-parents mais il n’y avait rien à faire ici.
D’ailleurs pourquoi devait-elle venir ici ? Elle avait passé l’âge d’être gardée.
A 17 ans, elle aurait pu rester seule à la maison, non ?
« Ah oui ? Première nouvelle. Et comment te serais-tu nourrie ? Ne me réponds pas. Je sais. Burger frites tous les jours, c’est ça ? A passer le reste de ton temps entre ton lit et la console ? » lui avait dit son père.
« Tu n’es pas juste. Tu ne me fais même pas confiance. » lui avait-elle rétorqué.
« Ces derniers temps, tu ne m’as effectivement pas donné l’impression que je pouvais le faire. Il faut t’appeler dix fois avant que tu ne daignes descendre dîner. Tu ne réponds pas quand je te parle. C’est bien simple. Tu passes ton temps sur ton téléphone. Aller passer des vacances chez tes grands-parents te fera du bien. Tu réapprendras à vivre sans ce fichu téléphone. Tu n’auras pas le choix car le réseau est très faible voire inexistant. »
« Quoi ? Mais ça va être l’enfer ! Tu n’as pas le droit de me faire ça. ».
« Ne discute pas. Ce n’est pas la peine. Ma décision est prise. Tes grands-parents t’attendent. »
« Mais qu’est-ce que je vais faire là-bas ? »
« C’est la campagne. Tu pourras te promener, faire une balade à cheval, lire, discuter… J’y ai passé toute ma jeunesse et, comme tu peux le voir, j’y ai survécu. »
« Non mais papa. C’est bon quoi ! Allez ! Papa ! Papa, s’il te plaît ! Je vais mourir là-bas. »
Elle se retrouvait donc aujourd’hui en pleine campagne.

Ccomplètement désemparée. Elle se levait le plus tard possible pour essayer de rendre les journées moins longues mais ce n’était pas suffisant. Même ces quelques heures lui semblaient une éternité.
Ses grands-parents avaient bien essayé de l’occuper mais cela ne l’intéressait pas.
Quel était l’intérêt de se promener ? Le paysage était toujours le même : un pré, des vaches, des moutons, un bois… Et puis, il y avait plein de mouches et d’autres bestioles bizarres.
Elle n’en pouvait plus de la nature.
En plus, pas une seule boutique dans ce coin paumé. L’épicerie ? Sérieux ? Ce n’est pas ce qu’elle appelait une boutique ! Certes, c’était le seul lieu de vie du village. L’épicerie « tout en un » : alimentation, quincaillerie, boulangerie et poste. Tout juste suffisant pour les vieux qui peuplaient ce village.

Car bien sûr, pas un seul jeune dans ce village.
A croire qu’ils avaient tous fui, ce qu’elle comprenait sans problème.
Elle l’aurait également fait si avait seulement pu trouver un moyen. Mais le premier arrêt de bus était à plus de deux kilomètres d’ici. Autant dire le bout du monde. En plus, elle n’était même pas certaine qu’il la ramènerait à la civilisation. Sans parler de la fureur de son père et la déception de sa grand-mère si elle essayait seulement.
Car Nannie essayait vraiment de la distraire, il faut le reconnaître. Elle l’emmenait avec elle quand elle sortait, lui avait fait visiter le village.
Elle lui avait même proposé de cuisiner avec elle. Cuisiner ? Mais quelle horreur ! Avec des légumes qu’elle ne connaissait même pas, en plus.
Alors elle lui avait donné des livres que son père lisait plus jeune. Mais Héloïse n’avait jamais aimé lire. Pourquoi le faire alors qu’aujourd’hui tu pouvais voir vivre les histoires au travers de films ou de vidéos ? Tu pouvais même être le témoin indiscret de la vie de certaines stars ou influenceuses. Ces filles postaient à longueur de journée leurs moments les plus intimes.
Non, décidément, les livres n’avaient aucun intérêt.
« Héloïse ? ».
C’était son grand-père qui l’appelait. Jusqu’ici, on ne lui avait pas demandé de participer aux activités de la ferme mais elle sentait que cela allait changer. Surtout si elle ne faisait pas au moins semblant d’être occupée.
Elle sentait la désapprobation de son grand-père enfler au fur et à mesure que les journées passaient. Il était d’ailleurs moins patient ces derniers jours.
Alors elle fit celle qui n’avait pas entendu, espérant gagner un peu de temps même si elle savait que c’était inutile.
Son grand-père apparut en effet à la porte de sa chambre.
Contrairement à son père, il n’était pas du genre à appeler éternellement.
« Héloïse, j’aurais besoin que tu aides ta grand-mère. Elle veut organiser un vide-grenier à la fin de la semaine et il faudrait l’aider à trier les affaires qui se trouvent au grenier. »
« Mais pourquoi moi ? Ce ne sont pas mes affaires. Comment je peux savoir ce qu’il faut garder ? »
« Je te le demande à toi car je vois que tu t’ennuies. Je l’aurais bien fait mais les travaux de la ferme m’occupent beaucoup en ce moment. Et je pense que cela ferait vraiment plaisir à ta grand-mère. Tu peux faire ça pour elle, non ? En ce moment, elle est très fatiguée et cela l’aiderait beaucoup. Et ce n’est pas comme si tu étais occupée plus que ça. »
« OK » répondit-elle sans enthousiasme.
« Dans ce cas, rejoins-là au grenier. Elle t’y attend. »
Héloïse monta au grenier en traînant des pieds.

Elle détestait la poussière et les vieux trucs. Et dire qu’Héléna, sa meilleure amie, se trouvait en vacances dans un hôtel club en Guadeloupe. Soleil, plage, garçons… Le bon plan, quoi. Mais elle n’avait pas le choix et retrouva donc sa grand-mère.
Elle la trouva effectivement sur place. Héloïse eut envie de fuir. Trop tard. Nannie l’avait aperçue et l’accueillait avec un grand sourire.
« Je suis contente que tu aies accepté de m’aider. Il faut vraiment vider ce grenier. Il y a trop de choses inutiles. Mais je n’y arrive pas toute seule. Il y a tellement de souvenirs ici que j’ai du mal à me décider à les jeter ou les donner, tu sais. En plus, il y fait tellement chaud. »
Héloïse remarqua que Nannie était effectivement décoiffée, en nage et pleine de poussière. Super ! Ca donnait vraiment envie ! En l’observant, Héloïse se rendit compte qu’en fait, elle n’avait pas l’air d’aller bien du tout.
Sa grand-mère était blanche.
« Ca va Nannie ? »
« Je ne sais pas. Je crois que j’ai besoin de m’asseoir. Quelques minutes. Pas plus. Tu veux bien continuer en m’attendant ? Tu verras. Ce n’est pas si désagréable. Tu devrais même tomber sur des livres, des jouets ou même les carnets de notes de ton père. Tout ce qui est à jeter est à mettre ici et tout ce qui doit être donné est stocké là.»
« OK ».
« A tout à l’heure ma chérie. »
Héloïse se retrouva alors toute seule au milieu du grenier. Elle ne savait pas par quel bout commencer. Il y en avait effectivement partout.
Pendant près d’une heure, elle tria les affaires.
Elle y passait moins de temps car elle n’avait pas d’attachement particulier pour les objets présents.
Elle fit un troisième tas pour les objets pour lesquels elle avait un doute. En effet, elle n’aurait su dire s’ils devaient être conservés même quand ils étaient en bon état. Elle avait reconnu un lecteur de cassettes car, même si elle n’en avait jamais utilisé, elle en avait vu un chez son père. Un objet préhistorique.
Elle attrapa l’objet suivant, une jolie boîte en métal.
En argent ? Elle n’aurait su le dire. Elle souffla dessus pour en faire partir la poussière… et éternua.
Que pouvait contenir la boîte ? Elle essaya de l’ouvrir. Mais où était le mécanisme ? Elle frotta la boîte pour en éliminer le reste de poussière. Ah, il est là. Elle réussit à l’ouvrir.
Oh, une boîte à musique avec une jolie danseuse !
Et une inscription gravée sur le couvercle. Quelques mots qu’elle eut bien du mal à déchiffrer car ils s’étaient en partie effacés avec le temps.
Elle plissa les yeux et lut :
« Un tour, dans la danse je me lance, deux tours c’est mieux mais encore peu, trois tours parfaits pour un vœu exaucé ».
Quoi ? Pas très clair mais il n’y avait peut-être rien à comprendre.
Bon, à jeter ou à donner ? D’abord, il fallait qu’elle vérifie si elle fonctionnait encore. Ah, il faut tourner ici.
Elle tourna le petit bouton.
Une musique se fit entendre et la danseuse commença à tourner avant de s’arrêter net. C’est court.
Héloïse tourna de nouveau le petit bouton mais plus longtemps. De nouveau la musique. Et la danseuse tourna encore… et s’arrêta. C’est encore peu.
Décidément !
Alors Héloïse tourna encore un peu plus le bouton. De nouveau, la musique s’enclencha et la danseuse s’élança dans la danse, fit un tour, puis deux, puis trois. Parfait !
Soudain, la ballerine s’illumina.

Et tourna de plus en plus vite jusqu’à disparaître.
Héloïse fut éblouie un instant. Quand elle rouvrit les yeux, elle vit la danseuse mais, cette fois-ci, elle semblait s’adresser à elle.
Ca y est. Elle délirait. Ce devait être la chaleur. Elle était dans ce maudit grenier depuis trop longtemps.
Elle ferma les yeux avant de les rouvrir. Mais la danseuse était toujours là et semblait attendre quelque chose.
« Alors, tu te décides, petite ? Quel est ton vœu ? Je n’ai pas que ça à faire ! »
Héloïse était tétanisée.
Elle s’était sous doute endormie sans s’en rendre compte. Et maintenant, elle rêvait.
« Et bien. Je suis tombée sur une idiote cette fois-ci. Petite, quel est ton souhait ? Si tu ne voulais rien, pourquoi m’as-tu sollicitée ? » demanda la fée.
« Sollicitée ? » répondit Héloïse.
« Oui. Tu m’as bien fait danser pour que j’exauce l’un de tes souhaits ? Alors, ne perdons pas de temps. Que souhaites-tu ? Un prince, une nouvelle robe, une jolie coiffure ? ».
« Euh, non. »
« Une cuisinière, des cours de piano ou de couture, un poney blanc avec un nœud rose ? »
« Non !!! Sérieux ? »

« Tu as bien envie de quelque chose, non ? »
« Euh oui. Du réseau. »
« Du quoi ?!!! Désolée mais je n’ai pas ça en boutique. Alors si tu n’as besoin de rien, je retourne dans ma boîte. »
« Attends ! Je n’y avais pas encore réfléchi, c’est tout. » répondit Héloïse.
Elle n’allait quand même pas laisser passer sa chance, même dans un rêve. Aussi bizarre soit-il.
« Dépêche-toi. Attention : réfléchis bien car tu n’as droit qu’à un seul vœu. »
« Ca y est. Mon vœu est que tu exauces tous mes vœux à l’avenir. »
« Je vois que j’ai affaire à une maline. Tu crois vraiment être la première à me dire ça ? Je perds patience, petite. Je te le répète : un seul et unique vœu. Certes, je veux bien regarder si je trouve quelque chose sur ton réseau mais tu dois être sûre de toi. Est-ce vraiment ce dont tu rêves ? ».
Héloïse réfléchit. « Non. Ce dont je rêve vraiment, c’est d’avoir un vrai local pour notre atelier de réparation. Mais ça, papa ne voudra jamais. »
« Un atelier de quoi ? »

« Avec des copains, on répare des objets que nous ramènent ceux de notre lycée. Vous savez, on n’a pas beaucoup d’argent dans le quartier. Alors quand quelqu’un casse ses écouteurs, son MP3 ou un autre appareil, on le répare pour lui. On ne fait pas payer. On s’échange juste des services entre nous. Un genre de troc. Seulement, ce n’est pas toujours facile parce qu’on n’a pas d’endroit pour le faire. »
« Mais ce n’est pas une activité de fille ! »
« Quoi ? Mais tu viens de quelle époque la danseuse ? »
« Hé ! Un peu de respect, petite. J’ai effectivement un certain nombre de pas de danse derrière moi mais je suis encore valide. Bon, je vais regarder ce que je peux faire pour ton histoire d’atelier. J’y vais de ce pas. Et n’oublie pas de refermer la boîte à musique derrière moi, s’il te plaît. »
« Héloïse ! Héloïse. Tout va bien ? »
Héloïse sursauta.
Elle s’était apparemment endormie.
Elle vit la boîte à musique à côté d’elle. Encore un rêve stupide.
« Oui Nannie. Je vais bien. »
« Mais tu as bien travaillé, ma chérie ! Tu as quasiment tout terminé. Merci beaucoup. Je sais que je ne t’ai pas beaucoup aidée mais je ne me sentais vraiment pas bien. Un gros coup de chaleur, je pense. Et bien tout est prêt pour notre vide-grenier de demain. »
Et le lendemain, le vide grenier connut effectivement un réel succès.

Néanmoins, il restait quelques objets. Et Nannie refusait de les jeter car ils étaient encore en bon état. Ils pouvaient certainement encore faire plaisir à quelqu’un.
« Je vais les amener à la Ressourcerie. Tu veux m’accompagner, ma puce ? Ce n’est pas très loin de chez toi d’ailleurs. »
« La Ressourcerie ? Qu’est-ce que c’est ? »
« Tu verras. Allez, je t’emmène. Cela pourrait bien t’intéresser. »
Elles s’y rendirent donc ensemble. Et c’est ainsi qu’Héloïse découvrit un endroit où des objets et meubles étaient déposés par des particuliers. Ils étaient réparés sur place et revendus à des prix très raisonnables. Et il y avait même un atelier avec tout le nécessaire pour réparer !

« Je me doutais bien que cela pourrait te plaire. J’ai remarqué que tu avais réparé certains des objets du grenier. Allez, viens, rentrons. Ton grand-père nous attend. Nous reviendrons un autre jour si tu le souhaites. Ils cherchent des bénévoles, tu sais. » lui dit Nannie.
Et effectivement, le grand-père les attendait.
« Viens. » dit-il à Héloïse. « Je voudrais te montrer quelque chose. »
Il l’emmena jusqu’au local qui jouxtait la ferme.
« Ta grand-mère m’a appelée quand vous étiez à la Ressourcerie. Apparemment, tu aimes réparer les objets et tu es plutôt douée. Je t’ai donc fait un peu de place ici. Il y a un établi et des outils. Je n’ai pas le temps de réparer certaines choses et je dois t’avouer que je n’en ai plus l’énergie non plus. Tes talents m’intéressent donc. Alors, si tu es intéressée, cet atelier est pour toi. Et puis, si tu veux, je pourrai t’amener aussi deux fois par semaine à la Ressourcerie. Ils t’apprendront plein de choses en échange d’un peu de ton temps. Qu’en dis-tu ? ».

En réponse, elle lui sauta au cou. « Merci grand-père. »
Ce furent certainement les plus belles vacances de sa vie.
En plus, la Ressourcerie lui proposa d’utiliser l’atelier de réparation avec ses amis en échange de quelques heures de bénévolat. Et même son père accepta à condition qu’elle ne délaisse pas ses études pour autant.
Elle aurait bien voulu remercier la ballerine mais elle ne retrouva jamais la boîte à musique. Nannie l’avait-elle donnée ? Celle-ci était incapable de s’en souvenir. Mais c’était tout aussi bien. La petite danseuse pourrait ainsi exaucer le rêve d’une autre personne.
Merci mille fois jolie ballerine !
Cette histoire « Héloïse et la Ressourcerie » vous a-t’elle plu ? Il faut savoir que les Ressourceries et les Repair Cafés ont une véritable utilité aujourd’hui.
Certes, notre société de consommation a aujourd’hui tendance à nous faire considérer chaque objet comme jetable.
Néanmoins, les mentalités changent.
En effet, nous sommes de plus en plus conscients de l’impact d’un tel comportement sur notre planète. Sans parler du coût.
C’est d’ailleurs pour ces raisons que le consommateur moyen se tourne de plus en plus vers du seconde main actuellement.
Nous en avons assez du mode « jetable ». De ce fait, je pense que l’indice de réparabilité, prévu dès janvier 2021 sur certains articles, deviendra un véritable critère d’achat pour le consommateur.
Et vous, vous êtes-vous déjà rendu dans une Ressourcerie ou un Repair Café ? Préférez-vous acheter du neuf ou du seconde main ? Je vous propose de retrouver des informations sur les ressourceries ici.
N’hésitez pas à me faire part de vos commentaires ou retours d’expérience ci-dessous. Je serai ravie de pouvoir vous lire.
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Et si vous avez aimé ce conte, sachez que vous pouvez en retrouver d’autres ici.
A bientôt.
Sophie